Green Lantern Green Arrow
Il y a de cela neuf ans, l’éditeur Urban Comics a réédité dans un album l’intégralité d’une série culte de deux grands auteurs de DC comics: “Green Lantern Green Arrow” écrite par le talentueux scénariste Dennis O’Neil et illustrée par l’immense dessinateur Neal Adams.
Voici ma critique et mon analyse de cette oeuvre majeure.
Après avoir réussi avec brio plusieurs missions sur d’autres planètes, le Green Lantern Hal Jordan est de retour sur sa planète natale la Terre, très heureux de retrouver ses compatriotes.
Tout à coup, il aperçoit un civil se faire bousculer, frapper et insulter par une brute.
Son sang ne fait qu’un tour et il vole au secours de la victime et neutralise l’individu qui le brutalisait.
Il est persuadé d’avoir accompli ce qui est juste et d’avoir agit comme il le fallait (l’homme qu’il a secouru par ailleurs le remercie): quelle n’est pas sa stupeur de voir les habitants du quartier l’insulter et lui jeter des déchets au visage !
Hal Jordan ne comprend pas ! Qu’a-t-il donc fait de mal ?
Son ami Oliver Queen alias Green Arrow lui explique alors la situation et les raisons pour lesquelles les gens réagissent ainsi:
L’homme qu’a secouru Green Lantern est en fait un escroc ainsi qu’une crapule de la pire espèce qui est le propriétaire de l’immeuble dans lequel vivent ses locataires. Il n’a pas déboursé un centime pour restaurer ce bâtiment insalubre et ces pauvres gens vivent dans des conditions précaires.
Pire encore le propriétaire de cet immeuble a l’intention de raser l’endroit pour y bâtir un parking tout en se moquant éperdument que ses anciens locataires finiront à la rue, et parmi eux, il y a des enfants, des personnes âgées…
À ce sujet, le jeune homme que Jordan a fait jeter en prison a un travail qui lui permettait de subvenir aux besoins de sa grand mère de 80 ans. À présent que son petit fils est derrière les barreaux, que va-t-elle devenir ?
Ensuite nous voyons un vieil homme noir qui interpelle Green Lantern et lui demande:
le vieil homme: “J’ai lu que vous travaillez pour des hommes à la peau bleue… Et que sur une planète lointaine, vous avez aidé des hommes oranges. Et aussi des hommes pourpres. Mais ne vous êtes vous jamais soucié… Des hommes noirs ! Pourquoi ? J’aimerais savoir ! Répondez moi monsieur Green Lantern !”
Green Lantern: “je ne sais pas…”
Hal Jordan voit ses certitudes vaciller, être ébranlées…
Comment depuis si longtemps, il n’a pas pu percevoir la détresse de ses concitoyens humains démunis ?
Que doit-il faire ?
Green Arrow lui propose alors des solutions pour pouvoir aider efficacement ces braves gens…
Le duo du fantastique scénariste Dennis O Neil et du légendaire dessinateur Neal Adams ont fait des étincelles sur Batman chez DC Comics: ils ont renoué avec l’esprit sombre et tourmenté du justicier de Gotham, créé des ennemis charismatiques du Caped Crusader tels que le savant Kirk Langstrom alias Man Bat ou encore le terrible Ra’s Al Ghul qui deviendra l’un des plus formidables antagonistes du Dark Knight.
Au début des années 70, Dennis O’Neil et Neal Adams lanceront la série Green Lantern et Green Arrow qui réunira ces deux super héros iconiques de DC et feront d’elle un authentique chef d’oeuvre qui est resté dans les annales de l’histoire des comics.
En effet, ils intégreront une très forte dimension sociale à cette bande dessinée en traitant de sujets de société graves et très sérieux tels que la misère, le chômage, la pollution, le racisme, la xénophobie, la corruption…
Au cours de ces aventures, Hal Jordan mûrira et se rendra compte que le monde n’est pas du tout manichéen mais qu’il est plutôt gris.
Green Arrow et Green Lantern ont des points de vue différents sur certaines situations: Jordan est convaincu qu’il faut absolument respecter la loi et est intransigeant à ce sujet tandis que Oliver est au contraire prêt à la défier et à ne pas obéir à celle-ci si cela lui permet de sauver des innocents et de se battre pour un cause juste.
Mais ils sont d’accord au moins sur un élément: combattre l’injustice et protéger les innocents.
Au cours de leur périple, ils seront confrontés à de cruels dilemmes et devront parfois se remettre en question sur ce qu’ils doivent faire.
De plus, ils ne ressortent pas toujours victorieux de leurs aventures, loin s’ en faut.
L’ensemble des histoires de cet album sont passionnantes, elles ne sont jamais trop moralisatrices ou pontifiantes et certaines d’entre elles sont bouleversantes et très émouvantes tel que le récit traitant du sujet de la drogue.
Si les dealers sont dépeints comme des monstres, les victimes de la drogue sont décrit avec beaucoup de subtilité: qu’est ce qui les poussent à se droguer ? Le mal de vivre ? La misère ? Le fait d’être seuls et délaissés par ceux qui se prétendent être leurs proches ? Une échappatoire pour fuir une réalité bien trop morose et triste ?
Cette histoire sera particulièrement éprouvante pour Oliver Queen qui lui permettra néanmoins d’ouvrir les yeux sur un fléau qu’il connaissait en fin de compte assez mal…
À noter aussi que Black Canary la bien aimée de Oliver Queen/Green Arrow jouera un rôle prépondérant dans de nombreuses histoires.
De plus, elle apportera une aide précieuse à notre “duo vert” et elle parviendra par exemple à mettre KO en un clin d’oeil des colosses qui avaient neutralisé les deux super héros en un claquement de doigts.
Elle est également dépeinte comme une femme bienveillante, compatissante et compréhensive: à ce sujet, le chapitre où elle veille sur Speedy le pupille de Green Arrow est particulièrement poignant.
Bien que le ton de beaucoup d’histoires soit grave et très sérieux, n’allez pas en déduire que les intrigues traitent uniquement de cela: certaines d’entre elles ont une bonne dose d’humour (mention spéciale à Green Arrow qui est souvent très drôle) et regorgent d’excellentes scènes d’action.
A noter aussi que lors de ce run, John Stewart le premier Green Lantern noir fait sa première apparition.
Et derrière, un comportement à priori agressif, celui ci prouve à Jordan qu’il sait aussi faire preuve d’un solide bon sens et est très observateur.
Ces récits n’ont rien perdu de leur immense force au fil des années, les sujets qui y sont abordés étant toujours d’actualité mais ils sont traités avec intelligence et pudeur.
Quant aux dessins de Neal Adams, ils sont magnifiques et sensationnels et n’ont absolument pas vieillis.
Ces dessins sont de vraies œuvres d’art à part entière et les expressions faciales de ces personnages retranscrivent à merveille les sentiments et les émotions qu’ils éprouvent.
À noter que Black Canary n’a jamais été aussi belle que sous sa plume, l’intrépide et touchante jeune femme dégage une beauté et une sensualité troublante et envoûtante…
Les décors quant à eux sont tout aussi somptueux.
Green Lantern et Green Arrow est un album exceptionnel et captivant d’un bout à l’autre.
C’est une bande dessinée intelligente, mature, prenante et très émouvante.
Très franchement, c’est un album que je conseille à tout le monde et qui est parfaitement abordable pour les lecteurs ne connaissant pas ces deux personnages.
Quant à l’édition de Urban, elle est excellente comme à l’accoutumée: le papier est soigné et la traduction française de Martin Winckler est d’une qualité exemplaire. 😀
Nous avons aussi comme bonus une interview captivante de Dick Giordano qui rend un vibrant hommage à son collègue et ami Neal Adams.