Fritz le chat de Ralph Bakshi (1972)
Fritz le Chat (1972)
Réalisation: Ralph Bakshi
Producteur : Steve Klantz
Scénario : Fred Halliday, Ralph Bakshi
Musiques : Ed Bogas, Ray Shanklin
D’après l’oeuvre de Robert Crumb
Fritz le chat est un jeune chat adulte étudiant à l’université. Fritz est un obsédé sexuel qui aime embobiner les jeunes filles en fleur en prétendant leur faire découvrir le sens de l’existence alors qu’il ne veut qu’une chose: coucher avec elles.
Sans s’en douter un seul instant, il va basculer dans une spirale d’évènements dont il ne ressortira pas indemne.
Fritz The Cat est le tout premier film d’animation cinématographique du grand Ralph Bakshi, qui fut aussi historique pour avoir été le premier long métrage d’animation classé X. C’est aussi la première adaptation animée de la célèbre BD éponyme de Robert Crumb.
Ralph Bakshi est mondialement connu pour avoir réalisé plusieurs oeuvres d’animation exclusivement destinées à un public adulte comme Tygra la Glace et le Feu, Coonskin, American Pop ou encore la sulfureuse série animée de science fiction futuriste Spicy City. Il fut aussi celui qui réalisa la première adaptation cinématographique du Seigneur des Anneaux de Tolkien, plus de 20 ans avant la trilogie de Peter Jackson.
Au sujet de Fritz le Chat ,Je me souviens que le film avait été diffusé en 1989 sur Canal + et mes parents ainsi que mes grands parents m’avaient catégoriquement interdit de le regarder.
J’ai pu ensuite le découvrir pratiquement 30 ans après, maintenant que je l’ai vu, je comprends aisément pourquoi. Non pas, parce que je ne l’ai pas aimé, très loin de là, mais j’étais vraiment trop jeune à la fin des années 80 pour voir un tel film.
Ce qui frappe en premier lieu avec ce long métrage, ce sont ses scènes de sexe: elles sont innombrables et on assiste régulièrement à des débauches sexuelles entre divers personnages, le récit étant truffé de personnages lubriques (Fritz le “héros” en premier lieu) qui ne manquent pas d’assouvir leurs pulsions dès que l’occasion se présente.
D’ailleurs, celle- ci vont souvent de paire avec des scènes où l’on voit des gens se défoncer à la drogue, perdant par conséquent pied avec la réalité.
Toutefois, le film ne se cantonne pas à cet aspect grivois, loin, très loin de là.
Fritz le chat est une oeuvre résolument subversive et contestataire, un film “coup de poing” ne laissant pas indifférent.
Fritz est bourré de défauts: il es râleur, menteur, paresseux (sa copine lui demande d’aller chercher de l’essence pour remplir le réservoir de la voiture, il refuse et la laisse en plan), pervers, gaffeur…
Et quand l’un de ses amis lui propose de commettre quelques larcins et autres vols, il ne rechigne pas à le faire.
Pourtant… il n’est pas fondamentalement mauvais et il lui arrivera de soutenir des nobles causes. Il se prend d’amitié pour certains corbeaux (l’équivalent des noirs/Afro Américains aux Etats Unis), il est scandalisé que ceux ci soient victimes de discrimination et n’hésitera pas à les soutenir pour qu’ils se battent pour leurs droits et soient égaux avec les autres animaux.
D’ailleurs, les propos de certains des corbeaux ne sont pas sans rappeler ce célèbre mouvement social révolutionnaire des années 60 les “Black Panthers” qui dénonçait les policiers corrompus qu’ils traitaient de “pigs” (cochons en Anglais).
Or les représentants de l’ordre dans ce film sont justement des… cochons, en l’occurence deux policiers bêtes, méchants, violents et irresponsables.
Impossible de ne pas faire le parallèle avec le célèbre roman La Ferme des Animaux de George Orwell où des porcs se sont emparés du pouvoir, via la démocratie et ont instauré ensuite un régime dictatorial.
Toutefois, bien que Fritz voulait accomplir une bonne action, la révolution dont il fut l’instigateur aura des conséquences funestes: les émeutes qui découleront de celle ci pousseront le gouvernement à agir par la force et bombardera Harlem, provoquant de nombreux morts… dont celle de l’un de ses meilleurs amis qui a voulu le protéger et s’es prit une balle perdue !
Fritz qui souhaite vivement faire évoluer la société en la révolutionnant perdra toutefois de sa naïveté au fil de l’histoire, il apprendra à ses dépens, que, sous les beaux discours de prétendus révolutionnaires, ces individus sont juste adeptes de violence et de sauvagerie. Il sera par exemple horrifié de voir un nazi maltraiter et violenter sa pauvre femme.
Fritz le Chat est un film résolument fascinant. Souvent très drôle et baignant dans un humour à la fois absurde, caustique et féroce, mais également dramatique et tragique, il suscite une vraie réflexion chez le spectateur tout en dénonçant les pires travers des Etats Unis d’Amérique. Autant dire que son propos est toujours pertinent et d’actualité de nos jours.
Robert Crumb a cependant désavoué et détesté le long métrage qui était selon lui trop éloigné de l’esprit de son oeuvre phare. Il terminera sa série peu après en réservant un sort funeste à Fritz… qui ne ne laissa pas de glace !
A noter que je l’ai vu en version française, par ailleurs excellente. Elle a bénéficié d’une adaptation française convaincante, n’édulcorant aucunement la crudité des dialogues de la version originale. Quant au doublage en lui même, on saluera l’interprétation magistrale de Roger Carel dans le rôle de Fritz, il a cerné à la perfection le caractère pas banal de cet anti héros hors norme.
Pour celles et ceux souhaitant découvrir ou redécouvrir ce grand classique, je ne saurai trop vous recommander le DVD Zone 1 qui a la VF et la VOSTFR, le DVD Britannique étant en VO pure.
Il est par ailleurs aberrant que Fritz le Chat qui est pourtant le film le plus célèbre et le plus populaire de Ralph Bakshi en France n’ait jamais bénéficié de DVD ou de Blu-Ray dans les pays francophones…