Lupin III : Green vs Red
Lupin III : Green vs Red
Durée: 80 mn
Réalisateur: Shigeyuki Miya
Scénario: Toschimichi Okawa
Musiques: Yuji Ohno
Résumé:
L’arrestation de cet individu ne passe pas inaperçue et est diffusée sur les télévisions du monde entier…
Cette horde de sosies de Lupin sème une pagaille de tous les diables dans la capitale, au grand dam de la police japonaise qui ne sait plus ou en donner de la tête !
Le commissariat de la vile sollicite alors l’aide de l’inspecteur Zenigata qui revient alors au Japon et il est fermement décidé à mettre Lupin derrière les barreaux une bonne fois pour toutes.
Jusque là, il menait une vie morose, banale et sans entrain, et son travail actuel l’ennuie à mourir.
Un jour, un mystérieux client laisse sa veste verte dans le restaurant. Yasuo la prend alors avec lui et petit à petit, son mode de vie change. Il s’amuse à jouer les pick pockets et à dérober les portefeuilles des passants… et réussit !
Il voue également une passion sans bornes envers Lupin III, il collectionne tous les journaux relatant les exploits et les forfaits de son idole et regarde tous les reportages qui lui sont dédiés.
Lors de ces moments, il est associé avec Jigen et ils ont tous les deux pour projet de dérober l’Ice Cube, un fabuleux diamant qui se trouve au milieu d’un building forteresse truffé de pièges.
Yasuo est bien déterminé à mettre le grappin sur ce bijou… Mais ce dont il ne se doute pas, c’est que le véritable Lupin III est arrivé en ville, lui aussi convoite l’Ice Cube et il est hors de question pour lui qu’un imposteur lui dame le pion et s’empare de celui ci à son nez et à sa barbe…
Un duel entre les deux hommes s’annonce inévitable, d’autant plus que Yasuo désire devenir un vrai Lupin III à part entière…
Critique :
Cette OAV a été produite pour commémorer le quarantième anniversaire du célèbre héros de Monkey Punch dont la popularité est restée toujours aussi forte qu’au premier jour au Japon.
La première OAV “Return of Pykal” qui marquait le retour d’un ennemi marquant de la première série télévisée et qui fêtait le trente cinquième anniversaire de Lupin a été un échec cuisant, la faute à un scénario déplorable et catastrophique.
Cette seconde OAV s’en sort elle mieux que son aînée ?
Et bien oui… mais elle est très spéciale.
“Green vs Red” est l’adaptation animée la plus atypique, la plus étrange et la plus déconcertante de la saga de Lupin III.
En fait, elle est exclusivement réservée aux fans de Lupin III connaissant très bien son univers, il est fortement déconseillé aux néophytes d’entamer leur découverte de Lupin III via cette OAV, ils seraient complètement déroutés.
De plus il est fondamental d’être très concentré pour suivre cette OAV tant la trame est complexe, voire nébuleuse.
En fait l’objectif que se fixent Lupin III et Yasuo pour acquérir l’Ice Cube n’est qu’un prétexte.
Le véritable propos de l’œuvre est: “Qu’est ce qui pousse Yasuo à vouloir devenir comme son idole, et même à devenir lui même Lupin III” ?
On se rend bien compte que la vie “ordinaire” de ce jeune homme l’est justement beaucoup trop à son goût, tant celle ci manque de tonus, de surprises, de péripéties.
Avant sa rencontre avec son client énigmatique, il se laissait vivre. Un des seuls éléments qui l’intéressait (hormis sa passion pour Lupin III), étant de savoir si sa grand mère, dont la santé est déclinante, parviendrait à se rétablir.
Cependant, quand il “devient” le Lupin à la veste verte, on a réellement la sensation que cela le revitalise.
Ce qu’il trouve exaltant au sujet de son héros, c’est que la vie de celui ci est pleine d’aventures, de péripéties, il vit au jour le jour et ne s’ennuie jamais.
Et il veut réellement devenir comme lui afin de pouvoir échapper à sa vie d’antan où il se morfondait perpétuellement.
On se sent toutefois peiné pour Yukiko qui s’inquiète sincèrement pour son bien aimé et a peur que celui ci s’expose au danger.
Par ailleurs, elle mènera son enquête auprès de Lupin III et cherchera à percer le mystère de ses origines, en allant consulter un bibliothécaire mystérieux ou encore l’inspecteur Zenigata lui même, l’ennemi juré de notre roi de la Cambriole qui le connaît sur le bout des doigts.
On déplorera par ailleurs que le scénario n’ait pas davantage développé l’idylle entre Yasuo et Yukiko et comment ils se sont rencontrés. On a même parfois l’impression qu’il s’agit d’un amour à sens unique.
Les passages les plus humoristiques et les plus loufoques sont essentiellement concentrés au début de l’histoire, la pagaille que provoque la multitude de Lupin à Tokyo donnant lieu à de nombreuses situations des plus cocasses et farfelues. Bon nombre d’entre eux finiront par être capturés par la police alors que certains échapperont aux forces de l’ordre.
En revanche, passé cette introduction comique, le ton du récit deviendra beaucoup plus sérieux par la suite.
Les policiers du commissariat de Tokyo finiront par se demander s’il existe plusieurs Lupin de par le monde, toutefois, Zenigata dissipera leurs doutes et leur affirme qu’il n’y a qu’un seul et unique Lupin et que tous les autres ne sont que de vulgaires imposteurs.
Notre cher inspecteur a par ailleurs un caractère semblable à celui du manga et du film “Dead or Alive”: il est très intelligent, méthodique, calculateur et très sérieux. Dans cette aventure, il n’y est pas un bouffon se faisant perpétuellement tourner en bourrique par son ennemi héréditaire contrairement à certains des téléfilms des années 2000 (où son rôle s’était réduit comme une peau de chagrin en raison de la santé défaillante de Goro Naya son interprète).
En dehors de Lupin lui même, Zenigata est le seul à avoir un rôle de premier plan au sein de l’intrigue, les autres personnages principaux étant hélas beaucoup plus en retrait.
Jigen est montré sous un jour très sympathique, dans un moment de l’histoire il se montre très bienveillant et paternaliste envers des enfants jouant au gendarme et au voleur et aidera même un de ces gamins à recharger et manier son revolver factice. Il lui déclare même “Tu sais, cela fait 40 ans que je manie les armes à feu, je m’y connais bien ! Allez amuse toi bien !”
Notre pistolero favori est dépeint comme un vieux baroudeur à qui on ne le fait pas, et il reste d’une grand loyauté envers Lupin, sans éprouver toutefois d’animosité particulière envers Yasuo.
Il l’aidera même au début de l’histoire, bien qu’il l’avait pris pour Lupin à ce stade du récit.
Le moment le plus impressionnant le mettant bien en valeur est celui ou il affronte un pilote d’hélicoptère et lui dit sur un ton plein d’assurance “Tu sais petit, je ne suis peut être plus tout jeune, mais je ne suis pas rouillé alors ne me sous estime pas !”
Goemon hélas est encore plus en retrait que son ami, au même titre que Jigen, c’est surtout sa loyauté envers Lupin qui est mise en avant. Il aura toutefois l’occasion de briller le temps d’une scène d’action mémorable au cours de laquelle il démontre une fois de plus que sa réputation de samouraï redoutable n’est nullement usurpée.
Fujiko quant à elle collaborera avec Yasuo afin qu’il puisse s’emparer de l’Ice Cube, non seulement parce qu’elle est attirée par ce “trésor” mais aussi parce qu’elle a la sensation que ce jeune homme a un potentiel pour devenir un grand cambrioleur.
Tout au long de l’OAV, on se rend bien compte que l’équipe ayant œuvré sur celle ci est de prouver que la longévité du plus célèbre héros de Monkey Punch est dû au fait que le personnage a su s’adapter à chacune de ses époques et que c’est la raison principale pour laquelle sa popularité perdure encore de nos jours. C’est un héros résolument intemporel.
Et cela est appuyé par les propos du bibliothécaire qui affirme à la journaliste Yukiko que le vrai Lupin n’a pas d’âge, ni de nationalité, comme s’il était une “entité” n’étant pas affectée par ce qui touche le commun des mortels sans toutefois être un “dieu” pour autant.
On notera aussi qu’il y a une ribambelle de références à des œuvres animées phares de la saga, puisqu’à certains moments du récit, nous pouvons voir le Lupin du film “Le Secret de Mamo” de Sôji Yoshikawa, le Lupin du téléfilm “Episode Zero First Contact” de Minoru Ohara, celui du film “Le Complot du Clan Fûma” de Masayuki Ozeki et Yasuô Otsuka…
On voit même un Lupin piloter un robot identique à celui du dernier épisode de “Shin Lupin III” la deuxième série animée télévisée de la saga !
Il y a aussi un passage qui pastiche une scène culte du long métrage “Le Château de Cagliostro” de Hayao Miyazaki, en l’occurrence, celle où Lupin et Jigen durant une folle course poursuite vole au secours de la princesse Clarisse pourchassée par des sbires du comte de Cagliostro grâce à leur Fiat 500.
On sent que Shigeyuki Miya le réalisateur de “Green vs Red” veut rendre un hommage sincère à tous les metteurs en scène, les animateurs, les scénaristes ayant contribué à forger la légende de Lupin III… et bien entendu à Monkey Punch.
A ce titre, la scène du duel final entre Lupin et Yasuo est absolument fabuleuse, le style graphique change radicalement pour se rapprocher de celui du mangaka et tout devient en noir et blanc (les personnages, les décors…) sauf les deux “Lupin” dont les vestes restent verte et rouge.
Un des plus grands atouts de “Green vs Red” est sa réalisation technique, qui n’ayons pas peur des mots, est sensationnelle.
Le character design est superbe et très expressif, l’animation est d’une fluidité inouïe (en particulier dans les fantastiques scènes d’action), tant celle-ci se rapproche davantage d’un long métrage d’animation cinématographique à gros budget que d’une OAV ordinaire, les décors sont très variés et somptueux, la mise en scène est très soignée et efficace. Par ailleurs, cette OAV fut projetée dans certaines salles de cinéma au Japon.
De plus, son dénouement est surprenant et a fait l’objet de multiples interprétations.
En conclusion, malgré certaines maladresses narratives, “Green vs Red” n’en demeure pas moins une OAV à voir absolument.
Elle est bien plus riche qu’il n’y paraît et est une œuvre résolument expérimentale à découvrir.
Mais elle est vraiment réservée aux fans inconditionnels de Lupin, les novices ne pouvant être que déconcertés par l’avalanche de références et sa trame nébuleuse.
Si un Lupin III avait été réalisé par Mamoru Oshii (ce qui a failli arriver pour le troisième long métrage animé cinématographique), nul doute que “son” Lupin aurait ressemblé par certains côtés à “Green vs Red”.
“Green vs Red” est controversé auprès de la communauté des fans (ce qui est compréhensible), mais pour ma part, je me rangerai auprès de ses fans, tant celle ci est fascinante et constitue une magnifique déclaration d’amour à l’un des plus grands héros de l’histoire de l’animation et de la bande dessinée japonaise.
Lupin III : Green vs Red n’est pas sorti en France, mais il est disponible en DVD et en Blu-Ray aux États Unis chez l’éditeur Discotek ainsi qu’en Italie.
Cette chronique est tirée du blog de mon ami Indianagilles dédiée au héros mythique de Monkey Punch.
https://lebloglupiniii.blogspot.com
Anecdotes :
– Yasuo, le prénom du héros de notre histoire est bien entendu un hommage à Yasuo Yamada, le plus célèbre et le plus talentueux comédien japonais à avoir interprété notre héros. Il l’a incarné de la première série télévisée de 1971 jusqu’à une publicité pour la firme Esso en 1995. Yasuo Yamada mourut en 1995, emporté par une hémorragie cérébrale.
– Cette OAV est le dernier animé de Lupin III où l’inspecteur Zenigata eut un rôle important du vivant de son interprète Goro Naya. En effet, le seiyuu du personnage souffrait d’un cancer de la gorge apparut au cours des années 2000, et, depuis le téléfilm de 2006 “Bohemian Rhapsody”, le rôle de l’inspecteur Zenigata s’est réduit comme une peau de chagrin afin de ménager la santé du comédien. Il prit sa retraite en 2011 et a été remplacé depuis par Koichi Yamadera (Spike Spiegel dans Cowboy Bebop). Goro Naya s’est éteint le 5 mars 2013 à cause d’insuffisances respiratoires. Pour beaucoup de fans japonais, le décès de ce grand comédien, c’est un peu comme si l’inspecteur Zenigata était parti pourchasser Lupin III au paradis…
– Au cours de l’histoire, nous pouvons voir un Lupin ayant une coupe afro.
C’est une référence à Nabeshin, un personnage récurrent de la série animée parodique “Excel Saga” qui est par ailleurs vêtu d’un costume de Lupin III ! Nabeshin est la caricature de Shinichi Watanabe qui est justement le réalisateur de Excel Saga. A noter aussi que Shinichi Watanabe a participé à la saga de Lupin III puisqu’il fut le réalisateur du téléfilm de 1999 “Fujiko’s Unlucky Days”.
– Le générique de début et de fin de « Green vs Red » est un remix du générique du film « Lupin III – Le Château de Cagliostro » de Hayao Miyazaki.